Le syndrome de l'imposteur
Lundi matin. C'est presqu'un lundi matin comme les autres. Presque.
À un détail près : c'est mon premier jour de travail à titre de directeur général.
Le saut est énorme. Et ce n'est pas un euphémisme. Le vendredi précédent je terminais un poste de chef cuisinier dans un steak house. Ranger ses couteaux, prendre un attaché-case et un stylo pour se lancer dans l'aventure et diriger une boîte de 75 employés, la barre est pour le moins haute!
Je viens de terminer mon DEC en finance. Cette formation, je l'ai obtenue à la dure. En effet, j'ai complété cette formation pendant sept ans à raison de deux soirs par semaine. Le jour, je travaillais dans les restos. Des journées longues et souvent harassantes. Lorsque l'occasion pour ce poste s'est présentée, je n'ai point hésité. J'ai sauté !
Les premiers jours sont concentrés sur mon intégration, découvrir l'organisation de l'entreprise et apprendre la culture de celle-ci. Je vois bien les regards inquiets du personnel à mon endroit et leurs salutations hésitantes. Je comprends tout à fait la situation. Phénomène normal quand tu ne connais pas encore ton nouveau patron.
En parlant de nouveau patron, le contexte est en réalité plus compliqué. Car le propriétaire, en m'embauchant, m'octroie le premier poste de gestion de l'organisation. Deux adjoints au directeur sont déjà en place depuis quelques années. Inutile de vous dire que la notion d'amitié ne s'est pas installée de facto! Ils ont l'expérience contrairement à moi. Rien n'est encore gagné !
Après quelque temps, je découvre une vaste consultation individuelle de tous les employés à mon insu. Un des adjoints tente de reprendre la barre en incitant les employés à se retourner contre moi! Une mutinerie!
Voilà un comité d'accueil que je me serais largement passé!
Cette découverte me gèle. Que dois-je faire? J'ai toujours travaillé fort pour obtenir mes postes. Nul besoin de me battre, mes valeurs et mes compétences justifiaient ma place au sein de l'équipe. Voilà que je dois maintenant engager un combat pour garder ma place ! Ai-je mis les pieds dans un nid de crabes?
Après réflexion, je décide de me battre !
Je rencontre le gestionnaire fautif seul à seul. Je lui fais part de mon mécontentement et lui assure que ma place n'est pas à prendre. Si la situation ne lui plait pas, la sortie n'est pas loin. Clair, simple mais ferme. Mon intention n'est rien d'autre que d'affirmer mon rôle et mes responsabilités.
Mon apprentissage commence sur les chapeaux de roues! Je décide que c'est ma place et que je la mérite. Au diable l'imposteur !
Je comprends dès lors que les défis seront à la hauteur du poste convoité. Je dois apprendre vite et assurer un leadership ressenti de tous. Je retiens de cette expérience de ne rien prendre pour acquis et que la solitude sera ma compagne la plus fiable.
Me voilà lancé!
Je garde mes gants de boxe rangés tout près. Au cas où...
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